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Par Eric Lascelles, Premier directeur général et économiste en chef 03 avril 2024

Dans sa webémission d’avril, notre économiste en chef analyse en profondeur ce qui se passe dans le monde entier. Bien que des risques soient toujours présents, les perspectives de croissance pour 2024 semblent reluisantes. Sur le plan économique, les bonnes nouvelles sont plus nombreuses que les mauvaises en ce moment. En voici des exemples :

  • Il est de plus en plus probable que nous éviterons une récession complète, car certains signes de récession s’inversent.

  • Les nouvelles concernant l’économie chinoise sont bonnes.

  • Le nombre de demandes de prestations d’assurance-emploi est faible aux États-Unis et les nouvelles économiques inspirent confiance.

  • Les conditions d’affaires au Canada se rétablissent.

  • Les perspectives du marché boursier sont réjouissantes.

Il discute aussi des taux d’intérêt, de l’inflation, des tendances de l’intelligence artificielle et de divers défis économiques qu’il entrevoit.

Durée : 27 minutes, 16 secondes

Transcription

Bonjour et bienvenue. Je m'appelle Eric Lascelles. Je suis l'économiste en chef de RBC Gestion mondiale d'actifs et je suis heureux de vous faire part de notre plus récente webdiffusion économique mensuelle : Un atterrissage en douceur toujours d'actualité, voulant dire que les données économiques continuent d’être excellentes. Il semble probable que l'économie puisse continuer à croître en 2024.

Nous continuons à signaler qu'il existe d'autres risques et que le risque de récession n'est pas du tout négligeable à l'heure actuelle. Néanmoins, les bonnes nouvelles économiques sont plus nombreuses que les mauvaises. Et bien sûr, nous nous en réjouissons.

Très bien, entrons dans le vif du sujet. Nous commencerons comme d’habitude par le bulletin de notes. Nous allons passer en revue les bonnes et les mauvaises nouvelles, de même que les nouvelles que l’on qualifierait d’intéressantes dans l'économie actuelle.

Le bilan. Commençons par le côté positif du bilan. Pour reprendre le titre de cette présentation, l’atterrissage en douceur est toujours d’actualité. De plus en plus d'éléments jouent en faveur d'un atterrissage en douceur, c'est-à-dire que l'économie continue de croître et ne tombe pas dans un atterrissage brutal. C'est une bonne chose. Parmi les facteurs qui soutiennent cette idée, le Livre Beige américain a rebondi récemment. J'en parlerai plus longuement dans un instant.

Il s’agit d’un élément qui était faible et qui nous rendait inquiets, mais un peu moins aujourd'hui. Toujours est-il que certains signaux de récession que nous avions suivis au cours des deux dernières années se sont inversés. Cela soutient également une interprétation économique plus optimiste.

Passons à la Chine, où nous passerons un peu de temps au cours de cette présentation.

La croissance de la productivité chinoise est-elle plus lente qu'il y a dix ans? Sans doute. Mais elle est encore positive. Ainsi, malgré tous les problèmes de la Chine, il existe toujours ce moteur sous-jacent de l'augmentation de la productivité, et c'est de là que vient la prospérité. Je pense donc qu'il faut conclure que la Chine continue de croître de manière importante et probablement durable, en dépit d'une série d'autres défis, dont l'un sera abordé dans un instant.

Enfin, et cela concerne certainement tous les investisseurs, les actifs à risque se portent bien. Quand je parle des actifs à risque, je fais référence de façon générale au marché boursier, au crédit et à d'autres types d’investissements historiquement plus volatils. Et pour la plupart, ceux-là se portent bien. Le marché boursier a beaucoup progressé au cours des quatre à six derniers mois.

Je mentionnerais quelques points là-dessus. Tout d’abord, il s’agit d’une situation fort agréable pour les investisseurs. D'autre part, les actifs à risque ont tendance à s'adapter à l'économie et aux perspectives économiques. S'ils se portent bien, c'est une bonne indication que l'économie va bien et qu'on s'attend à ce qu'elle aille bien.

Bien sûr, l'une des difficultés réside dans le fait que nous effectuons notre analyse économique dans l'optique de prévoir les marchés financiers. On ne peut se fier entièrement à ces mêmes marchés pour faire des prévisions économiques. Nous devons nous appuyer aussi sur nos propres connaissances. Néanmoins, le fait est que les marchés financiers se sentent plutôt bien et qu’ils sont optimistes.

Côté négatif, il y a quelques points à souligner. S’ils sont moins nombreux que les points positifs, je mentionnerai que le risque de récession est toujours présent. Nous avons parlé de 60 % de chances d'atterrissage en douceur et de 40 % de chances de récession. Et ce chiffre n’est pas insignifiant.

Le risque de récession est peut-être même encore plus faible que cela, mais nous n’en avons pas encore tenu compte dans nos chiffres. Les taux d'intérêt sont encore élevés. Gardons cela à l'esprit. Il s’agit là du principal obstacle à la croissance économique. La tendance à l'inflation s'est bien sûr beaucoup améliorée, passant de 8, 9 ou 10 % à une inflation d'environ 3 %.

Elle évolue beaucoup plus lentement aujourd'hui. Nous constatons donc qu'il est plus difficile de passer de 3 % à 2,5 %, comme on le souhaiterait. Et le chemin depuis 2,5 % jusqu’à l’objectif de 2 % des banques centrales est encore plus incertain. Cela complique un peu les choses, ce qui n'est pas idéal.

Cela oblige les banques centrales à demeurer prudentes. Les banques centrales sont-elles susceptibles de réduire leurs taux cette année? Probablement. Cet été nous parait un point de départ raisonnable. Mais l'économie résiste. Et si l'inflation ne diminue qu'à contrecœur, par petites touches, nous ne verrons peut-être pas autant de baisses de taux cette année.

Il faut donc être attentif à cela. Nous continuons à penser que le taux d'intérêt neutre devrait être bien plus bas qu'il ne l'est aujourd'hui. Il y a donc de la place pour un assouplissement au fil du temps, mais cela pourrait commencer plus lentement que prévu.

J'ai mentionné la Chine, où la productivité, sans être mauvaise, est plus lente qu'auparavant. L'immobilier chinois, en revanche, reste très préoccupant.

J'évoquerai au moins un aspect de la question dans un instant.

Enfin, du côté des aspects intéressants, parlons un peu des banques centrales. Nous attendons avec impatience que la Fed, la Banque du Canada, la Banque centrale européenne et d'autres banques centrales commencent à réduire leurs taux. Voilà la préoccupation principale.

Mais entre-temps, nous pouvons dire que d'autres banques centrales ont pris des mesures intéressantes, voire importantes. La Banque du Japon vient de relever ses taux pour la première fois en dix-sept ans. Elle suit son propre rythme. Cela dit, il s’agit là d’un indicateur tardif, car l’inflation au Japon avait augmenté plus tardivement que les autres.

Par conséquent, les taux d'intérêt augmentent plus tardivement dans ce pays. Il ne s'agit donc peut-être pas d'un guide pour le reste du monde. Mais le Japon est important en soi, et il s'agit d'une évolution très intéressante après près de deux décennies de taux d'intérêt stables, voire négatifs.

À l'inverse, la Banque nationale suisse, qui n'est peut-être pas l'une des principales banques centrales, mais qui n’en est pas si loin, se trouve à l'opposé de la situation.

Elle vient de baisser ses taux. La Banque du Japon a augmenté ses taux; la Banque nationale suisse les a baissés. Et cette baisse des taux nous a beaucoup surpris. Il faut savoir que la Suisse se trouve dans une situation économique un peu différente. De nombreux pays luttent pour ramener l'inflation en dessous de 3 %. L’inflation en Suisse est de 1,2 %. La Suisse est une petite économie au sein de l'Europe.

Elle est très orientée vers le commerce, très sensible à la monnaie. Sa monnaie était forte. En théorie, ceci aide à compenser cela. Je ne dirais donc pas que cela signifie que tous les autres pays devraient réduire leurs taux demain. Mais je pense qu'il s'agit d'un autre petit élément de preuve qui montre que nous pouvons envisager des baisses de taux à court terme.

L'autre commentaire porte sur le boom technologique.

Nous sommes toujours optimistes. Nous continuons de suivre avec intérêt le secteur technologique. Nous pensons que la croissance de la productivité s'accélérera avec le temps. Mais il faut du temps pour y parvenir. Fait à noter, cependant, nous ne voyons pas beaucoup de signes de l'essor des dépenses d'investissement ou la recherche et le développement que l'on attendrait normalement. Il faut rester patient, et je vous montrerai quelques graphiques à cet effet.

Voilà, je vous ai donné une vue d'ensemble et une table des matières de ce que nous prévoyons de faire. Passons à l'étape suivante et examinons à nouveau certains de ces éléments sous forme de graphiques.

L'atterrissage en douceur est toujours d'actualité. Tout d’abord, la thèse de l'atterrissage en douceur tient toujours la route. Nous observons de bons signes de croissance économique.

Voici le Livre Beige. Si vous ne le connaissez pas, sachez le Livre Beige est publié par la Réserve fédérale américaine. Il s'agit d'une enquête qualitative qui interroge les entreprises afin de savoir comment elles se sentent. Les entreprises répondent par «bien» ou «pas bien», mais pas par des chiffres. Nous faisons de notre mieux, nous, pour le faire. Nous accordons deux points pour «bien» et moins deux points pour «mauvais». Et au final, nous obtenons ce résultat. Il est bon de noter qu’au cours des derniers trimestres, le Livre Beige signalait une certaine prudence.

Cela nous avait rendu inquiets. Davantage de secteurs d'activité dans davantage de régions aux États-Unis signalaient que l'économie était stable ou en baisse, puis stable ou en croissance, et cela nous rendait inquiets. Le plus récent Livre Beige fait plutôt état d'un rebond réjouissant. Il est désormais plus évident que l'économie est en croissance, même selon cet indicateur particulièrement difficile.

Les données économiques à haute fréquence sont toujours bonnes. En ce qui concerne les autres indicateurs économiques, nous aimons regarder les mesures à haute fréquence. Il n'y en avait pas beaucoup auparavant, mais la pandémie, pour diverses raisons, a créé et encouragé la création d'un certain nombre d'entre eux. Il s'agit d'un indice économique hebdomadaire aux États-Unis. Il est géré par la Réserve fédérale de New York.

Vous pouvez voir que nous voyons encore des signes de croissance économique. Le plus souvent, la tendance se maintient toujours légèrement à la hausse. Mais le point le plus important est qu'elle se situe toujours confortablement au-dessus de zéro. Il n'y a donc aucun signe d'effondrement soudain selon les données de haute fréquence.

Le marché du travail se maintient, pour l'essentiel. De même, si l'on considère les marchés du travail, la situation est un peu plus nuancée et je parlerai de cette nuance dans la diapositive suivante.

Mais tout d'abord, je peux dire que lorsque nous regardons la mesure la plus fréquente du marché du travail, à savoir les demandes hebdomadaires d'allocations chômage, vous pouvez voir qu’elles sont plutôt stables. Il n’est pas facile de se faire une idée précise de la situation, car il n'y a pas beaucoup d'antécédents dans ce domaine. Mais il s'agit là aussi d'un niveau assez bas. Un niveau de demandes d'allocations chômage qui n’est pas élevé.

Peu de gens tombent au chômage en ce moment. Certaines lectures ont été erronées. Nous avons été inquiets à plusieurs reprises au cours des dernières années. On peut voir ici à quel moment les demandes d'allocations chômage ont commencé à augmenter. Historiquement, c'est un indicateur de récession. Mais à chaque fois, la tendance s'est inversée. Et aujourd'hui, il n’en est même pas question.

En fin de compte, force est d’admettre qu’on assiste à une stagnation des demandes d'allocations chômage. Tout va donc bien de ce côté-là. Cela dit, lorsque nous portons une attention particulière au marché du travail, nous voyons de petits signes de détresse ou de difficultés.

Les licenciements massifs sont plus nombreux que la normale. Par exemple, vous pouvez voir ici que le nombre d'annonces de licenciements massifs aux États-Unis est plus élevé que la normale.

En fait, il a même augmenté récemment, même si cette ligne dorée a été un peu plus élevée pendant la majeure partie de l'année écoulée. Il n'est pas certain que nous entrions en territoire nouveau, mais plutôt que le marché du travail a connu une période d'activité supérieure à la normale.

Mais en fin de compte, les demandes globales d'allocations chômage sont toujours faibles. Le niveau d'embauche reste assez bon. Nous sommes un peu inquiets de la baisse de l'emploi temporaire. Historiquement, c’eût été un signe de problème, mais ça fait si longtemps qu’il est à la baisse qu’il semble inapproprié d’en parler.

Il s’agit donc d’une interprétation incertaine. De manière plus générale, le marché du travail semble se porter bien, même si le taux de chômage augmente légèrement. La situation reste relativement stable.

Le sentiment face à l’actualité monte en flèche. Celui-ci est assez curieux. Je n’en parle pas souvent, mais je pense qu'il vaut la peine de s'y attarder, simplement parce qu'il a tellement bougé.

Faisons la tournée des bureaux régionaux de la Réserve fédérale. La Fed de San Francisco maintient un indice quotidien du sentiment économique à l'échelle nationale. Vous pouvez constater que les nouvelles économiques ont été plutôt mauvaises en 2023, en particulier au cours du premier semestre. Elles ont ensuite été un peu moins sombres au cours de la seconde moitié de l'année.

Ces derniers temps, la situation est devenue positive. Nous recevons de nombreuses nouvelles économiques favorables, et il s'agit parfois d'un cercle vertueux qui se construit de lui-même. On reçoit des nouvelles positives, les gens s'enthousiasment, et le marché boursier est en hausse sur la base d'informations plutôt limitées. Mais nous avons tout de même trouvé cela utile.

Lorsque le sentiment face à l’actualité est négatif, les marchés traversent une mauvaise période. À l’inverse, lorsqu'il est positif, il s’agit d’une bonne période pour les marchés. Il est clair que le sentiment est réellement positif en ce moment. Rien n'indique que nous soyons sur le point d'assister à un brusque ralentissement de l'économie. Toujours conforme à la thèse de l'atterrissage en douceur. Un petit clin d'œil en direction du Canada.

Les signaux économiques canadiens semblent également satisfaisants. L’une des mesures les plus fréquentes et les plus utiles que nous examinons au Canada est l'indice du climat des affaires établi par Statistique Canada. Précisons que cet indice est censé augmenter au fil du temps. Une hausse ne signifie rien d’extraordinaire, mais simplement que les choses évoluent normalement.

Néanmoins, vous pouvez constater que non seulement cet indice augmente au fil du temps, y compris au cours des derniers mois, mais qu'il a également atteint des sommets impressionnants récemment.

La volatilité est chose connue. Je ne sais pas si ce dernier pic se maintient ou s'il se résorbe comme l'ont fait certains des pics précédents. Mais on ne peut pas dire qu'il y ait une grande détresse au Canada non plus. En effet, le dernier mois de création d'emplois au Canada a été plutôt bon. Il s'agissait d'environ 40 000 emplois, tous à temps plein.

Il semblerait donc que l'économie canadienne tienne le coup, même si l'augmentation des taux d'intérêt provoque manifestement une certaine détresse.

Si l'on regarde ce qui se passe dans le monde, on s'aperçoit que les États-Unis sont vraiment l'économie d’exception, l'économie qui a continué à naviguer sur la vague. Le Canada n'a pas fait aussi bien, même s'il a réussi à éviter la menace d’une contraction économique.

Peut-on en dire autant du Royaume-Uni, de l'Allemagne ou même du Japon?

De nombreuses économies sont faibles, mais ne souffrent pas vraiment. Voici le cas du Royaume-Uni. Ce qui est plus haut est bon et ce qui est plus bas est mauvais. Nous avons inclus deux données. Nous avons inclus l'économie. Ce sont les barres bleu foncé. Nous avons également inclus le marché du travail. C'est la ligne bleu clair. Il y a deux ou trois choses à retenir. La première est que l'économie britannique, l'économie allemande et l'économie japonaise ont toutes été très faibles récemment.

Vous pouvez voir que le Royaume-Uni vient d'enregistrer deux trimestres consécutifs de baisse du PIB. Certains parleraient de récession technique. Pour ma part, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une véritable récession, car le marché du travail est resté assez solide tout au long de cette période. La ligne bleu clair est élevée. Elle signifie que le taux de chômage est bas, et que les embauches se poursuivent.

On peut parler d’une déconnexion inhabituelle entre une économie qui s'est contractée et le fait que personne ne ressente réellement de douleur. Et l’histoire est semblable en Allemagne et au Japon.

On peut donc dire que les économies sont faibles et qu'elles n'ont pas connu de croissance. Et pourtant, il serait tout à fait exagéré de parler de véritable récession.

Une légère baisse de la production ne signifie pas une récession, à moins de constater une véritable souffrance sur le marché du travail ou de voir les marchés reculer. Et ce n'est pas le cas. En fin de compte, d'autres pays ont certainement enregistré des performances inférieures à celles des États-Unis et n'ont pas connu la plus heureuse des expériences au cours de l'année écoulée.

Mais nous ne parlerons pas de récession, compte tenu de la situation du marché du travail, qui s'est maintenue à un niveau satisfaisant.

L'inflation s'est accélérée au cours des derniers mois. Passons maintenant à l'inflation. Quelques précisions. La ligne dorée représente l'IPC (indice des prix à la consommation) mensuel. Il s’agit des chiffres aux États-Unis, mais la situation est semblable dans d’autres pays.

La variation d'un mois sur l'autre a été assez forte au cours des deux derniers mois. Nous sommes donc revenus à un monde dans lequel l'inflation évolue un peu plus rapidement que nous le souhaiterions. Et comme je l'ai mentionné précédemment, bien que vous ne puissiez pas le voir ici parce qu'il ne s'agit que de données mensuelles, la mesure de l'inflation annuelle est toujours de l'ordre d'environ 3 % par an, ce qui est trop rapide.

Vous pouvez voir la ligne bleue, il s'agit d'une estimation de l'inflation en temps réel. Elle indique qu'effectivement, l'inflation s'est accélérée ces derniers temps. Notez que j’enregistre ceci à la toute fin du mois de mars et nous n'aurons pas les données d'inflation de mars avant la mi-avril.

La mesure en temps réel, cependant, nous indiquent que les chiffres de mars seront probablement un peu difficiles aussi. Cela renforce donc l'idée qu'il faudra un certain temps avant que l'inflation ne se stabilise complètement si nous n'avons pas de récession. Les récessions ne sont jamais géniales en soi, mais elles permettent de rétablir le pouvoir de fixation des prix des entreprises.

Elles peuvent tirer les salaires vers le bas et agir de manière à maîtriser l'inflation. Sans une récession, le chemin sera plus difficile pour maîtriser l'inflation.

L'inflation se trouve toujours dans une situation délicate. En suivant ce que disent le marché et d'autres indicateurs, le pouvoir de fixation des prix des entreprises…

Il semble que les entreprises aient abusé de ce pouvoir, ce qui explique pourquoi l'inflation était si élevée. Les tendances à l'augmentation des prix ont été nombreuses en 2021 et 2022. Comme vous pouvez le constater, nous avons connu un recul impressionnant. On peut y voir une certaine hausse, puis un certain recul.

Cela dépend donc de la fréquence à laquelle on regarde

Pour moi, la tendance est la suivante : les entreprises prévoyaient d'augmenter fortement leurs prix, et elles l'ont fait. Elles l'ont fait puis les ont réduits de manière significative. Et maintenant, nous avons constaté une légère dérive à la hausse qui suggère, encore une fois, qu'il est plus difficile de maîtriser cette inflation.

Nous pensons donc que l'inflation peut baisser sous les 3 %. Nous pensons que nous pouvons atteindre une fourchette de 2,5 % au cours de l'année prochaine, sur la base d'autres éléments que nous observons. Mais il est difficile de dire avec quelle facilité nous pourrons descendre sous un taux d'inflation de 2,5 %. Il s’agit d’un moindre mal, cela dit, car on ne parle pas ici d’un taux de 9 %.

À ce moment-là, il s’agissait d’un problème grave. Mais on ne veut pas rester bloqués à un niveau plus élevé. Cela nécessiterait des taux d'intérêt plus élevés. Cela aurait un effet corrosif sur le niveau de vie et serait tout simplement indésirable dans un sens plus général.

Les prévisions d'inflation estiment qu’elle pourrait rester bloquée dans une fourchette de 2,5 à 3 %. Quand on regarde les attentes en matière d'inflation, pour être honnête, ce graphique demande un peu d’explications.

Il s'agit de mesures différentes des attentes en matière d'inflation. Certaines sont celles du marché. En fait, il s’agit de ce que pensent les marchés financiers en bleu foncé, ce que pensent les consommateurs en bleu clair, ce que pensent les entreprises en doré. C'est un peu comme si l'on comparait des pommes et des oranges en ce qui concerne les mesures des consommateurs et des entreprises. Les mesures des entreprises pour l'année à venir, et les deux autres pour les cinq prochaines années.

Cela ressemble à des pommes et des oranges. Mais historiquement, les consommateurs ont toujours pensé que l'inflation serait plus élevée. Les différences de perception existent.

Quant à moi, je m’intéresse à ce que sont les attentes en matière d'inflation aujourd'hui par rapport à ce qu'elles ont été normalement, disons, au cours des dix ou vingt dernières années, et quel en est l'écart.

Quel est l'écart ? L'écart est dû au fait que ces prévisions tablent sur une inflation supérieure à la normale d'environ un demi-point à un point de pourcentage. Si l’on fait correspondre cela à une inflation normale de 2 %, alors qu’on recherche une inflation de 2,5 à 3 %, là où l’on dit que nous sommes coincés.

Nous sommes peut-être un peu plus optimistes que cela. Nous pensons que nous pouvons descendre dans le bas de cette fourchette. La question de savoir si nous pouvons descendre plus bas reste ouverte. Il parait plus difficile de continuer à améliorer l'inflation à partir d'ici. Et nous pensons que c'est en grande partie la raison pour laquelle les banques centrales doivent agir avec prudence.

D’accord pour des baisses de taux, mais pas en trop grand nombre et pas nécessairement tout de suite.

L'atterrissage en douceur et l'inflation persistante plaident en faveur de baisses de taux graduelles, alors qu’historiquement, les cycles d'assouplissement ont été rapides. J’ai l’impression de me contredire, mais si l'on regarde l'historique des cycles de réduction des taux, en utilisant à nouveau les États-Unis comme référence, voici comment le taux directeur a évolué. Le zéro est le pic du taux directeur au départ, puis les chiffres indiquent le nombre de points de pourcentage des réductions de taux au cours de diverses périodes et divers cycles, comme vous pouvez le voir au bas de l'écran.

Encore une fois, il y a beaucoup de variations; aucun cycle n'est identique à un autre. Mais pour généraliser, on peut dire que normalement, lorsque les banques centrales ou lorsque la Fed commence à réduire les taux, on voit quelques centaines de points de base, quelques points de pourcentage de réduction des taux au cours de la première année. Et cela pourrait être un peu plus difficile cette fois-ci.

Il se peut que nous n'allions pas aussi loin, étant donné que normalement, lorsque les banques centrales commencent à réduire leurs taux, cela veut dire qu’on entre en récession. Il y a urgence. L'inflation n'est pas un problème à ce stade. Les banques centrales pourraient s'inquiéter de la déflation en de telles circonstances, mais ce n'est pas vraiment le cas cette fois-ci.

Nous allons donc dire que ce cycle d'assouplissement pourrait être plus tranquille que les cycles d'assouplissement historiques, mais il convient de garder à l'esprit la façon dont l'histoire s'est déroulée, car les événements riment souvent avec l'histoire.

D'accord. Quelques autres sujets, peut-être plus idiosyncrasiques, à aborder ici.

Les soucis de la productivité canadienne se sont encore aggravés. Parlons de la productivité canadienne. Je pense qu'il est bien connu qu'elle a été une source de faiblesse réelle ces dernières années. En effet, comme le montre la ligne dorée, nous avons assisté à un déclin du PIB (produit intérieur brut) par habitant au cours de l'année écoulée. C'est donc tout à fait inhabituel.

Normalement, la prospérité augmente au fil du temps en dehors des récessions. Néanmoins, nous avons assisté à un déclin pur et simple. En effet, il s'agit aujourd'hui du niveau de prospérité le plus bas. Ou plutôt, on pourrait parler du même niveau de prospérité qu'il y a huit ans, ce qui n'est pas une bonne chose. On aurait certainement espéré une augmentation de la prospérité au cours de cette période.

En effet, il s'agit de la pire période de huit ans, à l'exception des brèves périodes de récession. Ce n'est donc pas génial.

Pour ce qui est des raisons de cette situation, une partie est liée à l'immigration qui a cours en ce moment et qui s’amène sur le marché du travail, mais cela ne peut expliquer les huit années. Au pire, cela pourrait expliquer les deux dernières années. D'autres raisons sont liées aux contrecoups postpandémiques, lesquels devraient être temporaires.

Mais en réalité, il s’agit d’un problème qui dure depuis un certain temps. Même lorsque la productivité augmentait, elle progressait assez lentement. Elle accusait un retard considérable par rapport aux États-Unis et même par rapport à d'autres marchés. On comprend que le Canada ne fait pas assez de dépenses d'investissement, de recherche et de développement. L'environnement commercial ne semble tout simplement pas être propice aux gains de productivité que nous aimerions voir.

Le problème est réel car si le PIB global augmente, ce n’est qu’en raison de l’augmentation de la population. Le Canadien moyen ne s'enrichit pas. Et cette question devrait être une priorité politique, ce qui n'a pas été le cas ces dernières années. J'espère donc que nous assisterons à un changement de cap. Mais il s’agit d’un processus lent.

Ce n'est pas quelque chose qui se transforme instantanément.

L'intelligence artificielle suscite l'enthousiasme. Passons à la technologie de l'intelligence artificielle. Quelques mots rapides pour dire que nous vivons une période passionnante. Je l'ai déjà dit, nous sommes optimistes en ce qui concerne l'IA générative. Nous pensons qu'il pourrait s'agir d'une technologie à usage général, le genre de phénomène qui fait progresser la prospérité et la productivité à l'échelle mondiale sur une longue période de temps.

Voilà qui est passionnant. Il s'agit en fait d'une étude Google Trends sur le nombre de fois où les gens entrent le terme «intelligence artificielle» sur l'internet. Vous pouvez voir qu'il s'est vraiment passé quelque chose ces dernières années et que les gens sont beaucoup plus à l'écoute et utilisent peut-être même certains des logiciels d'intelligence artificielle disponibles.

Ils sont conscients qu'il s'agit d'une tendance. Et bien sûr, le marché boursier a adopté cette tendance avec beaucoup d'enthousiasme. Il s'agit d'un phénomène réel, qui mérite d'être souligné. Nous savons tous que les bénéfices de Nvidia, qui fabrique des puces électroniques, ont grimpé en flèche. Certaines entreprises profitent donc pleinement de la situation sur ce front.

Mais lorsque l'on creuse un peu, preuves à l’appui, la croissance de la productivité n'est pas immédiate. Elle survient après quelques années d'investissement, de recherche et d'adoption de nouvelles technologies. Il faudra attendre encore pour que ne se produise la croissance supplémentaire de la productivité que nous attendons tous. En attendant, il nous faudrait voir plus de recherche et développement et plus de dépenses en capital.

Et ce n'est pas encore le cas.

La recherche et le développement ne sont pas encore en plein essor. Permettez-moi de remettre les pendules à l’heure. La part du PIB consacrée à la recherche et au développement aux États-Unis se trouve ici en bleu. Elle a connu une belle progression au cours des dernières décennies. Il y a donc beaucoup plus de recherche et de développement aujourd'hui qu'il y a vingt ans. Et c’est tant mieux.

Mais la question est de savoir ce qui s'est passé au cours des deux dernières années, lorsque le dernier boom de l'IA s'est produit. Curieusement, nous n'avons pas constaté de forte augmentation. Les chiffres ont augmenté jusqu'à l'année dernière, mais ils n'ont pas augmenté particulièrement vite par rapport aux deux décennies précédentes. En fait, ils ont même baissé au cours de l'année écoulée. Je tiens à souligner qu'il y a des raisons fiscales à cela.

Il existait un crédit d'amortissement accéléré pour la R&D qui a expiré il n'y a pas si longtemps, ce qui explique probablement cette situation. Ce crédit pourrait être réintroduit, ce qui nous permettrait d'entrevoir des jours meilleurs. Il n'en reste pas moins que la R&D n'a pas augmenté avec le boom économique. En fait, nous en voyons un peu moins. C'est assez curieux. Nous n'obtenons pas l'effet économique que nous recherchons.

Nous pensons que nous allons l'obtenir, mais ce n'est pas encore le cas.

Les dépenses d'investissement en ordinateurs ont chuté récemment. L’histoire se répète ici. Au lieu de la recherche, il s'agit simplement d'investissements en capital. Vous pouvez constater que les investissements dans les logiciels continuent d'augmenter, mais pas plus vite qu'avant ces dernières années. On aurait pu penser qu'une grande partie de l'investissement se ferait dans le domaine de l'informatique, les ordinateurs et l'équipement périphérique.

Et vous pouvez constater que si ces investissements ont bien augmenté au cours des dernières décennies, ils ont en fait diminué au cours de l'année ou des deux dernières années. Nous sommes un peu perplexes à ce sujet, pour être honnête. Je suppose que cela s'explique en partie par le fait que l'on a beaucoup acheté d'ordinateurs portables pour les employés pendant la pandémie.

Il se peut donc que nous revenions simplement à une tendance plus modérée. Quoi qu'il en soit, nous n'assistons pas au boom évident de la R&D et des dépenses en capital promis par l'IA. Nous pensons que nous allons obtenir davantage avec le temps, mais cela semble être un peu plus lent à venir. Nous devons donc être patients sur ce point.

Je vais terminer par deux graphiques sur la Chine.

La croissance de la productivité chinoise est en baisse, mais reste bonne. Le premier graphique, sans être génial, demeure positif. Il s’agit du graphique de la productivité. La ligne pointillée dorée se veut une sorte de mesure de la tendance, car elle est fluctuante. Néanmoins, le PIB par habitant est un indicateur de la productivité. Il est certain que la Chine a enregistré une croissance étonnante. Il y a eu des périodes où la croissance de la productivité chinoise était de 14 % par an, ce qui était extraordinaire, même si c'était il y a plus de quinze ans.

La croissance de la productivité chinoise ralentit depuis un certain temps. Cela dit, même avec ce ralentissement, on parle encore d'environ 5 % par an. Comparé à zéro au Canada, ou comparé à un taux tendanciel d'un ou un et demi pour cent dans beaucoup de pays développés, c’est excellent.

On perd cela de vue parce que l'économie chinoise dans son ensemble ne croît pas aussi rapidement que ne diminue sa population. Cela dit, l'individu moyen continue de s'enrichir matériellement chaque année. Nous pensons que la croissance de la productivité chinoise va continuer à ralentir à partir de maintenant.

Néanmoins, la Chine peut encore être un moteur de la croissance mondiale. Elle peut devenir plus riche, même dans le contexte des défis du marché immobilier, que j'aborderai ensuite, même dans le contexte des guerres commerciales et de tous ces autres éléments.

La Chine continue de progresser et même un peu mieux qu'on ne le pense, si l'on met de côté la diminution de la population.

Le marché immobilier chinois reste problématique. Je terminerai par ceci. Il s'agit d'un graphique intéressant, qui va au-delà du contexte chinois. Il s'agit de l'accessibilité au logement à l'échelle internationale; une mesure assez simple. Il s'agit simplement du rapport entre le prix du logement et le revenu. Il ne tient donc pas compte des taux hypothécaires ni d'autres considérations pertinentes pour déterminer qui peut se permettre quoi.

Mais c'est une façon claire et nette de comparer les pays. Vous pouvez constater que la Chine et Hong Kong sont de loin les marchés immobiliers les moins abordables. Le prix moyen d'un logement représente plus de trente fois le revenu annuel moyen, ce qui est un chiffre assez fou. Faites le calcul et demandez-vous si une personne moyenne peut se permettre cela.

Avec la durée moyenne d'une carrière de quarante ans, vous investissez 75 % de votre argent avant impôts. Ce n'est pas une proposition tout à fait viable. On peut donc s'inquiéter de la viabilité de cette situation. Permettez-moi d’en douter. On voit maintenant les prix de l'immobilier chinois chuter tandis que les revenus des Chinois augmentent.

C'est l'autre secret de la pérennité d'une telle situation, à savoir que la personne moyenne qui achète une maison aura un revenu plus élevé dans cinq ou dix ans, ce qui contribue à résoudre une partie du problème. Mais les valorisations restent difficiles et la situation s'est aggravée au cours de la dernière décennie. Nous sommes donc sceptiques quant à la capacité du marché immobilier chinois à se maintenir à ce niveau.

Il y a probablement encore une période de faiblesse et, en effet, les ventes de logements sont en baisse. Comme je l'ai dit, les prix des logements sont en baisse et les constructeurs, dans certains cas, sont techniquement insolvables. Il s'agit d'un véritable défi, sachant que l’immobilier représente un moteur essentiel de la croissance économique chinoise. Nous sommes certainement beaucoup plus prudents et conservateurs dans nos prévisions de croissance chinoise que nous ne l'étions auparavant.

Nous tablons ici sur un taux de croissance tendanciel de 3 ou 4 % par an, et ce, même avec ces problèmes de logement. Mais cela montre bien que le marché immobilier chinois a besoin d'être corrigé avant de redevenir une source de croissance.

Je vais m'arrêter ici.

J'espère que vous avez trouvé cela intéressant. En conclusion, la thèse de l'atterrissage en douceur semble toujours intacte, mais d'autres choses intéressantes se passent en marge de l'atterrissage.

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Vous y trouverez un onglet «Perspectives» avec un tas d’autres rubriques intéressantes. Des vidéos et même cette webdiffusion finiront par s'y retrouver. Je vous invite donc à vous y rendre.

Je conclue en vous remerciant encore une fois pour le temps que vous m'avez accordé. Je vous souhaite beaucoup de succès dans vos investissements et je vous donne rendez-vous le mois prochain.

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Déclarations

Date de publication : 03 avril 2024

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