Les élections américaines bouleversées
Sur le front des élections présidentielles aux États-Unis, on est tenté d’invoquer la fameuse phrase de Lénine qui disait qu’« il y a des semaines tellement mouvementées que des décennies semblent s’être écoulées ». Beaucoup de choses se sont passées dernièrement.
Avec à peine trois mois à courir avant la tenue du vote, le président Biden a cédé aux pressions du parti démocrate et a abandonné la course à la présidence. Ceci, après avoir considérablement tiré de l’arrière dans les sondages et offert une piètre performance lors du premier débat, ainsi qu’en raison des préoccupations croissantes concernant son état de santé.
Pendant ce temps, du côté républicain, l’ancien président Trump a survécu à une tentative d’assassinat qui a failli lui coûter la vie, de manière assez héroïque pour que sa campagne bénéficie d’une vague de soutien initial.
Donald Trump a également choisi son colistier, J. D. Vance, qui partage les points de vue populistes du candidat républicain et qui est peut-être encore plus isolationniste sur le plan économique et géopolitique. M. Vance est aussi contre les grosses entreprises et les baisses d’impôt pour les riches et pour la négociation collective. Le parti républicain n’est plus le parti de M. Reagan. Évidemment, le vice-président n’a aucun droit d’établissement des politiques.
Qui va affronter M. Trump du côté des démocrates ? Malgré une certaine incertitude initiale, le parti s’est rapidement rallié autour de la vice-présidente Kamala Harris. Elle est connue à l’échelle nationale, elle figure déjà sur le bulletin et peut accéder directement à l’artillerie électorale de Joe Biden. Les marchés des paris estiment à plus de 90 % les probabilités, qui continuent de grimper, qu’elle soit la candidate du parti démocrate. C’est presque certainement sous-estimé, puisque pratiquement tous les membres influents du parti se sont rangés derrière elle, et elle a déjà obtenu le soutien de suffisamment de délégués pour être nommée.
Ce qui est clair, c’est que les élections sont aujourd’hui plus incertaines qu’il y a quelques semaines et, malgré toutes les hésitations, une victoire de Donald Trump est maintenant un peu moins probable. Les marchés des paris évaluent à 54,5 % les chances d’une victoire de Donald Trump, contre 45,5 % pour Kamala Harris.
L’autre possibilité – une convention ouverte au cours de laquelle plusieurs candidats se disputent le vote des membres du parti, comme cela s’est produit en 1968 – risquerait de diviser le parti par idéologie, de possiblement faire dévier le parti plus à gauche à un moment où le centre politique est inoccupé, de laisser trop peu de temps au vainqueur pour constituer un réel opposant à M. Trump, et se produire trop tard pour que le vainqueur figure sur les bulletins de vote de l’Ohio.
Bien que Kamala Harris soit elle-même considérée comme occupant un espace politique à gauche de Joe Biden, en pratique, elle semble s’être rapprochée un peu du centre depuis sa tentative malheureuse à l’investiture démocrate en 2020. De plus, elle se sentira probablement obligée de poursuivre les politiques de M. Biden. En réalité, les présidents sont contraints par le Congrès de prôner des politiques particulièrement énergiques. Ultimement, il est peu probable que Kamala Harris gouverne bien plus à gauche que Joe Biden.
Selon les sondages actuels, Donald Trump reste sans aucun doute le favori (voir le prochain graphique). Kamala Harris fait cependant un peu meilleure figure que Joe Biden, et elle profite maintenant d’un gain de popularité. Reste à voir s’il se maintiendra et ce que pensera le public d’elle en apprenant à mieux la connaître.
Ce qui est clair, c’est que les élections sont aujourd’hui plus incertaines qu’il y a quelques semaines et, malgré toutes les hésitations, une victoire de Donald Trump est maintenant un peu moins probable. Les marchés des paris évaluent à 54,5 % les chances d’une victoire de Donald Trump, contre 45,5 % pour Kamala Harris.
Les probabilités d’un président républicain ont augmenté et diminué sur les marchés de prédiction
Au 24 juillet 2024. D’après les marchés de prédiction et les calculs de RBC GMA. Sources : Predictit, Macrobond, RBC GMA.
On pourrait aussi avancer que le parti démocrate, même s’il conteste en fin de compte la perte de la présidence, pourrait s’en tirer un peu mieux avec un candidat plus populaire. En retour, les probabilités d’un balayage républicain – qui n’avait jamais été le scénario de base, mais qui était considéré comme un scénario secondaire de plus en plus concevable tant que Joe Biden était dans la course – ont quelque peu diminué. Les marchés des paris indiquent actuellement que les démocrates devraient s’emparer de la Chambre des représentants, même s’ils prévoient qu’ils céderont le Sénat aux républicains (voir le graphique suivant).
Élections de 2024 aux États-Unis
Au 24 juillet 2024. Les probabilités de victoire à l’élection présidentielle résultent de la médiane des prédictions entre oddschecker, Predictit et RealClearPolitics (RCP). Les statistiques électorales pour le Sénat et la Chambre des représentants sont basées sur les prévisions du public recueillies par Good Judgment. Sources : oddschecker, PredictIt, RCP, Macrobond, RBC GMA.
Du point de vue des marchés financiers, la victoire de Trump se traduirait par un dollar plus fort, des taux plus élevés et un vent d’enthousiasme sur le marché boursier, en particulier pour les actions de sociétés qui ne sont pas des mégacapitalisations. La logique qui sous-tend cette théorie, dans le cadre d’une administration Trump, est que la hausse des droits de douane et les mesures de relance économique stimulent le dollar, que la vigueur économique et l’augmentation de la dette font monter les taux, et que les mesures de relance donnent également de l’élan au marché boursier. Par ailleurs, Trump et Vance sont particulièrement critiques à l’égard des grandes sociétés technologiques, ce qui explique pourquoi elles ne profiteraient pas de l’essor.
Évidemment, nous ne verrons peut-être pas renaître le programme de Trump. Depuis peu, c’est plutôt le contraire qui se dessine, car Harris vit une vraie lune de miel. Cela dit, les statistiques continuent de pointer en faveur de Trump, ce qui signifie que son programme pourrait bien revenir à l’ordre du jour.
Pouvoir exécutif
Au cours des dernières décennies, les administrations successives de la Maison-Blanche ont renforcé leur autorité sur les bureaucrates en matière d’interprétation et d’exécution des lois, ce qui a accru le pouvoir exécutif américain.
Si les présidents ont pu se le permettre, c’est principalement pour deux raisons.
D’abord, les lois comportent souvent des zones d’ambiguïté qui donnent lieu à un éventail d’interprétations.
Puis, le pouvoir exécutif décide des ressources allouées à l’exécution de chaque loi, ce qui détermine la puissance de l’exécution de la loi en question.
Bien sûr, il existe des contrôles à l’égard du pouvoir d’un président, avec notamment la possibilité de clarifier les lois par voie législative ou de les soumettre à la Cour suprême, ce qui permet au pouvoir judiciaire de se prononcer sur ce qui dépasse les limites du pouvoir exécutif.
Cependant, de nombreux décrets ont été adoptés par les dernières administrations. Le nombre de décrets de Biden n’étant pas loin derrière la multitude de décrets promulgués par Trump avant lui. Les présidents successifs se sont particulièrement penchés sur l’immigration, mais l’administration Biden s’est aussi intéressée aux prêts étudiants et à l’environnement, tandis que l’administration Trump a mis l’accent sur le commerce international.
Si nous mentionnons ces faits, c’est pour en venir à deux changements qui pourraient modifier la portée des décrets exécutifs à l’avenir. Le premier changement semble donner un peu plus de pouvoir à la Maison-Blanche, tandis que le second pourrait profondément réduire ce même pouvoir.
Le 1erjuillet, la Cour suprême a statué que les présidents bénéficient de l’immunité tant qu’ils exécutent des « actes officiels ». Bien que la discussion se soit concentrée sur la protection de l’ancien président Trump dans le contexte de ses divers problèmes juridiques, cette décision pourrait aussi encourager les futurs présidents à agir de façon plus arbitraire, en sachant que même si leurs actions sont jugées comme un dépassement de leurs limites réglementaires, ils ne seront pas poursuivis pour ces actions. Cela représente une augmentation relative du pouvoir exécutif, même si l’on peut espérer que les futurs présidents se garderont de prendre des mesures juridiquement contestables.
Cependant, sans doute pour pousser plus fortement dans la direction opposée, c’est-à-dire vers la limitation du pouvoir exécutif, une décision différente de la Cour suprême en date du 30 juin a annulé la doctrine Chevron, laquelle remonte à une affaire de 1984 où la jurisprudence avait accordé aux organismes fédéraux une flexibilité « raisonnable » dans l’interprétation des lois américaines. Maintenant que cette doctrine n’est plus applicable, les présidents pourraient se trouver beaucoup plus limités dans ce qu’ils peuvent accomplir par voie de décret. Au minimum, les décisions du pouvoir exécutif et des organismes fédéraux seront plus sensibles aux remises en question devant la Cour suprême.
Selon certains analystes, cela ne fait qu’officialiser le rôle de plus en plus activiste des poursuites et des décisions judiciaires en ce qui concerne l’interprétation des lois ces dernières années, donc il se pourrait que le changement ne soit pas trop marqué. Cependant, des restrictions additionnelles sont attendues, en particulier dans les domaines où l’intervention présidentielle est importante, comme l’environnement, les conditions de travail, les frontières et les droits de douane.
Au risque d’aller trop loin, si les présidents sont de plus en plus limités dans leur capacité à promulguer de nouveaux règlements, cela pourrait ressembler à une certaine déréglementation – moins de restrictions, globalement – avec des implications potentiellement positives pour les sociétés et le marché boursier. Bien entendu, l’important est de savoir quels règlements spécifiques pourraient être remis en question ou rejetés par voie judiciaire, car il existe de nombreux décrets exécutifs qui viennent indirectement en aide à certaines sociétés. Les changements prendront probablement un certain temps avant de se matérialiser, mais il pourrait s’agir de l’une des évolutions les plus importantes de l’année.
Panne informatique
La panne informatique mondiale causée par CrowdStrike est décrite comme une perturbation de l’ampleur du « bogue de l’an 2000 », à la différence qu’elle s’est réellement produite. De plus, contrairement au bogue de l’an 2000, personne n’a vu venir la catastrophe. D’un autre côté, cette panne n’exige pas de reprogrammer tous les logiciels existants pour passer de numéros d’années de deux à quatre chiffres, et un correctif logiciel a déjà été mis en œuvre.
Le point à retenir est que dans le monde entier, la majorité des organisations tributaires de systèmes informatiques ont été soit perturbées, soit ébranlées pendant un jour ou deux, et que les effets devraient persister pendant plusieurs semaines. En particulier :
De nombreuses compagnies aériennes ont dû maintenir leurs avions au sol.
Des hôpitaux ont perdu l’accès aux dossiers des patients.
Les opérations des banques et des marchés financiers n’ont pas pu être exécutées normalement.
Les hôtels ont perdu l’accès aux réservations.
Les déplacements transfrontaliers ont subi des retards importants.
Ce choc à court terme pourrait légèrement faire baisser la production économique de juillet, mais il est important de noter que les perturbations sont rapidement résolues et que nous verrons probablement un rattrapage, dans les prochains jours, qui devrait neutraliser une partie de l’impact sur le PIB. Tout cela s’apparente aux distorsions économiques passagères qui surviennent à la suite de catastrophes naturelles.
Parmi les répercussions à long terme, les sociétés pourraient porter une plus grande attention à la résilience de leurs systèmes informatiques, peut-être au point de sacrifier un peu de rentabilité au profit de la fiabilité.
De même, il semble raisonnable de s’attendre à ce que les autorités réglementaires, déjà méfiantes à l’égard des sociétés technologiques, les surveillent d’encore plus près. Cela augmente le risque d’un renforcement de la réglementation qui pourrait limiter la souplesse de ces entreprises technologiques.
La santé budgétaire
Au cours des dernières années, nous avons déploré à maintes reprises les lourds déficits budgétaires (voir le graphique suivant) et les charges importantes de la dette publique (voir le graphique suivant) qui prévalent aux quatre coins du monde. Nous avons souligné que les marchés commenceront peut-être à s’intéresser davantage au problème lorsque d’autres difficultés pressantes telles que l’inflation auront diminué tout en nous inquiétant de la nécessité de trouver une solution à ces problèmes ou de les prendre en compte dans les années à venir.
Plusieurs pays connaissent des déficits budgétaires assez importants
Données pour 2023. Sources : Fonds monétaire international, Macrobond, RBC GMA.
Dans de nombreux pays, le ratio de la dette au PIB est élevé
Données pour 2023. Sources : Fonds monétaire international, Macrobond, RBC GMA.
Le problème s’est particulièrement envenimé maintenant que les taux d’intérêt mondiaux ne sont plus aussi bas que dans les années 2010. Certes, les déficits importants étaient peut-être excusables pendant les pires heures de la pandémie, mais ces jours-là sont désormais révolus. Peu d’arguments permettent de justifier le type d’excès budgétaires actuels : en général, les économies flirtent avec leur potentiel et l’inflation dépasse toujours sa cible.
Quantification du problème
Au lieu de verser dans les généralisations, examinons correctement les chiffres (voir le tableau suivant), dans le but de quantifier le problème entre les pays et de trouver d’éventuelles solutions.
Notre dernière carte de pointage sur la santé budgétaire
Données de 2023 pour tous les indicateurs, à l’exception des versements d’intérêts (2022) et de la croissance du PIB (prévisions du Fonds monétaire international (FMI) pour l’année 2020 utilisées comme l’indicateur d’une situation normale). Le rajustement budgétaire désigne la réduction nécessaire du déficit budgétaire pour stabiliser le ratio de la dette au PIB. Sources : FMI, Macrobond, RBC GMA.
Nous avons établi un indice de la santé budgétaire pour chacun des 27 pays, tout en reconnaissant que la santé budgétaire ne dépend pas d’un seul facteur, mais plutôt d’un amalgame des éléments suivants :
la charge de la dette publique en pourcentage du PIB (les mesures budgétaires comprenant les administrations publiques à tout échelon)
le solde budgétaire de l’exercice courant en pourcentage du PIB
le rajustement budgétaire, c.-à-d. la réduction nécessaire du déficit d’un pays en pourcentage du PIB pour stabiliser son ratio de la dette au PIB
les versements d’intérêts de la dette publique en pourcentage du PIB, qui reflètent le degré de la capacité économique d’un pays réaffectée aux obligations liées au service de la dette publique
le taux de croissance économique à l’état d’équilibre, qui montre la vitesse à laquelle un pays peut sortir d’une situation budgétaire périlleuse
la balance des opérations courantes, qui indique si un pays est globalement un épargnant net ou un emprunteur net, compte tenu du secteur privé
le fait de savoir si les créditeurs de la dette publique sont nationaux ou étrangers (ce qui témoigne de la fragilité potentielle des détenteurs d’obligations d’un pays et de la vulnérabilité en cas de dépréciation de la monnaie)
le fait de savoir si un pays contrôle sa propre monnaie (ce qui donne une marge de manœuvre supplémentaire pour gérer les problèmes de dette dus à la capacité d’un pays de rajuster son taux de change et sa politique monétaire).
Chaque variable s’accompagne d’une note allant de 1 à 5, 1 étant « bon » et 5, « très mauvais ». Ces notes sont indiquées au moyen de couleurs dans le tableau et les graphiques. Les diverses variables sont ensuite pondérées et combinées afin de produire l’indice de la santé budgétaire de chaque pays (voir le graphique suivant).
Seule une poignée de pays affichent une bonne santé budgétaire
La santé budgétaire d’un pays est mesurée à l’aide d’un indice établi selon une échelle de 1 (bonne) à 5 (très mauvaise) et calculé à partir d’une moyenne pondérée de divers paramètres. Sources : Macrobond, calculs de RBC GMA
Le Danemark, la Suède et l’Irlande sont en tête de l’indice de santé budgétaire, tandis que la Russie, l’Australie, la Corée du Sud et les Pays-Bas suivent de près. Chacun de ces pays a une dette publique relativement faible, enregistre un excédent ou un léger déficit budgétaire, alloue peu de fonds publics au service de la dette et n’a pas besoin de procéder à un quelconque ajustement budgétaire pour demeurer sur une trajectoire soutenable.
À l’opposé, on trouve l’Italie, suivie d’assez loin par les États-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et le Brésil. La France et la Belgique méritent également d’être mentionnées. Ce groupe présente des caractéristiques un peu plus variées. L’Italie fait piètre figure dans presque toutes les catégories, avec un niveau d’endettement et un déficit problématiques et un ajustement budgétaire nécessaire.
Les États-Unis sont encore plus mal lotis que l’Italie en ce qui a trait au déficit et se trouvent dans une situation comparable pour l’ajustement budgétaire. Toutefois, le pays part d’un niveau d’endettement un peu moins élevé et a une économie qui croît plus vite. De plus, les États-Unis jouissent d’un privilège qui n’est pas directement pris en compte dans l’indice de santé budgétaire : une monnaie de réserve qui les protège davantage de la défection des acheteurs d’obligations, contrairement à d’autres pays qui y sont plus exposés. Mais ils ne sont pas totalement à l’abri de devoir payer des taux d’intérêt plus élevés en réaction à un risque budgétaire perçu, comme le montre l’augmentation de la prime de terme du pays au cours des dernières années.
Bien qu’également en mauvaise posture, le Royaume-Uni a un niveau d’endettement, un déficit budgétaire et un déficit du compte courant plus faibles que les États-Unis, mais le pays s’en sort moins bien pour ce qui est des paiements d’intérêts et du taux de croissance économique.
Et bien sûr, il y a le Japon et son énorme dette publique (252 % du PIB), son déficit considérable et son PIB qui croît lentement. Mais le pays a l’avantage de ne payer que très peu d’intérêts grâce à des taux extrêmement bas. Par ailleurs, il s’en sort plutôt mieux qu’il ne le devrait dans notre indice de santé budgétaire, puisque notre système de classification lui attribue la même note (« très mauvaise ») qu’à l’Italie, même si le montant de sa dette est presque deux fois supérieur.
Le Brésil n’a pas une dette publique particulièrement élevée, mais il affiche un important déficit et, contrairement à de nombreux pays émergents, a un taux de croissance économique très faible.
Certains pays sont particulièrement mal classés dans une catégorie, comme la Grèce dont la dette représente 169 % du PIB, ou l’Inde dont le ratio déficit/PIB est de 8,7 %, mais ils se rattrapent en obtenant de meilleurs résultats dans d’autres catégories. La Grèce, par exemple, n’accuse plus qu’un léger déficit. L’Inde a un taux de croissance économique tellement élevé qu’elle peut supporter un déficit bien supérieur à celui de la plupart des pays.
Comme on pouvait s’y attendre, les pays émergents tendent à avoir les paiements d’intérêts les plus élevés, du fait qu’ils sont presque toujours assujettis à une prime de risque plus importante sur le marché obligataire (voir le graphique suivant). Mais il va aussi sans dire qu’ils enregistrent souvent des taux de croissance plus élevés.
Le paiement des intérêts sont un plus grand fardeau pour certains pays que d’autres
Données de 2022. Sources : Base de données sur les finances publiques dans l’histoire moderne, FMI, RBC GMA
Bien qu’il affiche un ratio dette/PIB élevé, le Canada enregistre un déficit suffisamment faible pour figurer en meilleure position que bon nombre de pays.
Il est quelque peu rassurant de constater que la plupart des pays ont déjà connu des ratios dette/PIB plus élevés qu’aujourd’hui (voir le graphique suivant). Cependant, nous ne devons pas minimiser le risque actuel, puisque certains des records historiques ont été établis pendant la pandémie ou au lendemain de la crise financière mondiale lorsque le dénominateur du PIB était artificiellement bas. En outre, d’autres records remontent à une époque où le taux de croissance durable du PIB était considérablement plus élevé (ce qui facilitait le remboursement ultérieur de la dette).
Les ratios dette/PIB sont élevés, mais n’ont pas battu de record
Données pour 2023. Sources : FMI, Macrobond, RBC GMA
À la recherche de solutions
Que doivent faire les pays pour retrouver des bases plus durables ? Ils doivent au minimum stabiliser leurs ratios dette/PIB pour les faire situer à des niveaux proches des niveaux actuels. L’ajustement budgétaire nécessaire reflète l’ampleur de la réduction du déficit d’un pays en proportion du PIB pour atteindre cet objectif de base (voir le graphique suivant).
Certains pays ont besoin d’un ajustement budgétaire important
Données pour 2023. L’ajustement budgétaire se rapporte à l’amélioration nécessaire du solde budgétaire d’un pays pour stabiliser le ratio dette publique/PIB. Sources : FMI, Macrobond, RBC GMA
Cette mesure n’est pas parfaite, car elle montre que c’est la Norvège qui a le plus de travail à faire. C’est techniquement exact, mais pas tout à fait juste, car la dette publique de la Norvège ne représente que 42 % de son PIB, soit l’un des taux les plus bas parmi les 27 pays. La Norvège peut se permettre d’afficher un déficit important et de laisser sa dette augmenter plus longtemps que n’importe quel autre pays.
Ce concept est plus utile pour les pays dont le niveau d’endettement est déjà élevé. L’Italie, les États-Unis et le Japon se trouvent à l’intersection d’une dette publique élevée et d’un important ajustement budgétaire nécessaire dans le diagramme de Venn. Ce n’est pas un hasard si ces trois pays figurent parmi les quatre pays mal classés dans notre indice de santé budgétaire.
La valeur ajoutée de la mesure d’ajustement budgétaire tient principalement au fait qu’elle donne une bonne idée de la difficulté liée à la stabilisation des ratios dette/PIB. Un taux de 4,5 % est indiqué pour les États-Unis. Cela signifie que les États-Unis doivent réduire leur déficit en pourcentage du PIB de 4,5 points de pourcentage, ce qui est énorme. Pour être plus précis, les États-Unis continueront d’afficher un déficit qui sera désormais assez faible pour qu’une croissance économique nominale positive puisse le compenser au niveau du ratio dette/PIB.
Que pourraient faire les États-Unis pour ajuster les 4,5 points de pourcentage ?
La méthode la plus conventionnelle et la plus mécanique serait certes de réduire les dépenses publiques ou d’augmenter les revenus du gouvernement. Mais cet élément ne constitue pas une priorité politique pour les candidats actuels en lice pour la présidence, et si l’on suppose de manière simpliste la présence d’un multiplicateur budgétaire de un, l’appliquer en une seule année garantirait une récession assez profonde ; l’appliquer sur une période de deux ans générerait probablement une récession. Et même en étant optimistes, plus de quatre ans s’écouleraient avant que le problème se résolve, et il faudrait que se manifeste de façon soudaine une volonté politique pour qu’on arrive à un tel résultat. Nous soulevons la probabilité d’un malaise économique à moyen terme étant donné que bien des pays ajustent leurs excès budgétaires sur plusieurs années.
Le scénario le plus probable pour le moment est que les pays ne prennent que très peu de mesures à court terme, sauf peut-être une légère réduction de leurs déficits. Il semble pourtant inévitable que des interventions plus énergiques soient nécessaires par la suite.
Les pays pourraient, de préférence, favoriser une croissance économique durable. Il est possible que l’évolution technologique rapide stimule la productivité, ou qu’un autre choc exogène permette aux économies de croître durablement et de manière plus rapide. Mais l’on ne peut pas vraiment anticiper cette option qui ne fera qu’accroître le risque.
Les pays pourraient aussi choisir de laisser grimper le taux d’inflation puisque c’est du taux de croissance économique nominale dont on a besoin pour mesurer les ratios dette/PIB, et non de celui de la croissance réelle. L’inflation fait partie de la croissance nominale. C’est l’une des raisons pour lesquelles les gens spéculent parfois sur le fait que les gouvernements pourraient choisir de laisser l’inflation se situer à un niveau un peu plus élevé qu’avant la pandémie, peut-être dans la fourchette haute de 2 %. C’est possible, même si pour l’instant les banques centrales semblent plus disposées à prendre des mesures pour se rapprocher de la cible des 2 %. Cela dit, nous partons du principe que l’inflation à long terme est légèrement supérieure à 2 %. Cette vision ne peut n’être que temporairement favorable, puisqu’une fois que le marché obligataire aura compris ce qui se passe, et que la dette publique aura été intégrée dans le nouveau régime de taux d’intérêt, l’avantage sera perdu de manière significative.
L’autre option consiste à ne pas rembourser une partie de la dette. En général, il ne s’agit pas de dire explicitement « désolé, nous ne vous rembourserons pas », mais plutôt de modifier les modalités de la dette. Par exemple, le gouvernement peut payer moins d’intérêts ou repousser la date d’échéance de la dette de manière à réduire la valeur actuelle de celle-ci et à faire économiser de l’argent à l’État. C’est ce qui s’est passé en Grèce lors de la crise de la dette souveraine. Cette solution serait utilisée en dernier recours et ne semble pas particulièrement envisageable à l’heure actuelle. Cependant, si les taux des obligations japonaises venaient à augmenter fortement, l’endettement du pays pourrait devenir insoutenable et obliger le pays à recourir à une solution extrême. De même, si une récession profonde devait survenir et faire passer à 10 %, par exemple, le ratio déficit/PIB d’un pays qui dépasse déjà les 6 %, l’endettement pourrait rapidement devenir intenable. Toutefois, soyons clairs : la probabilité de défaillance reste faible.
Le scénario le plus probable pour le moment est que les pays ne prennent que très peu de mesures à court terme, sauf peut-être une légère réduction de leurs déficits. Il semble pourtant inévitable que des interventions plus énergiques soient nécessaires par la suite. Les progrès techniques viendront peut-être au galop à la rescousse, et il semble raisonnable de penser que l’inflation pourrait augmenter un peu plus qu’elle ne l’aurait fait autrement. Cependant, la principale solution consistera à ce que les gouvernements resserrent leurs budgets, probablement après que le marché obligataire aura exprimé son mécontentement par une hausse de la prime de risque. Rappelons que le marché obligataire a réagi violemment au Royaume-Uni à l’automne 2022, entraînant la démission du premier ministre et modifiant la trajectoire budgétaire.
Comme nous l’avons mentionné plus haut, l’ajustement devra se faire en plusieurs années et peut-être même en plusieurs mandats, sera extrêmement impopulaire et constitue un solide argument en faveur d’une croissance économique un peu plus faible que la normale de 2025 jusqu’à la fin de la décennie.
Il est important de noter que tous les pays ne sont pas touchés de la même manière. Certains sont en mesure de traverser cette période sans subir trop de conséquences, tandis que d’autres (ceux dont l’indice de santé budgétaire est le plus mauvais) ont du pain sur la planche et risquent de connaître une croissance économique plus lente et des primes de risque plus élevées sur le marché obligataire.
Un danger propre aux États-Unis est que le pays puisse ne rien faire du tout, étant donné le mépris total des finances publiques sur le plan politique et son statut particulier sur le marché obligataire mondial. Or, une telle attitude est très dangereuse, car elle risque de donner aux États-Unis assez de corde pour se pendre. Un scénario très réel se dessine, dans lequel le ratio dette/PIB des États-Unis s’accroît de plus en plus pour se rapprocher de celui du Japon (sans les taux d’intérêt très bas). Même si le marché obligataire ne se montre jamais réticent, les États-Unis se retrouveraient à consacrer une partie de plus en plus importante de leur capacité de production au service de la dette, au lieu de fournir des services ou de laisser l’argent aux contribuables. Des problèmes économiques chroniques pourraient facilement apparaître.
Certes, le calcul n’est pas aussi simple, puisque chaque dollar d’intérêt est versé à un épargnant qui pourrait très bien l’utiliser lui-même de manière productive. Cependant, les travaux de Reinhart et Rogoff, entre autres, démontrent de façon convaincante qu’un endettement supérieur est lié à de plus mauvais résultats économiques. C’est à tout le moins une chose à éviter.
L’inflation s’atténue
Les craintes liées à l’inflation continuent de s’estomper. La situation reste préoccupante, étant donné les taux d’inflation encore élevés, les divers coûts à la hausse (coûts d’habitation, coûts de transport, salaires) et les risques (politique budgétaire expansive, agitation géopolitique liée au pétrole) qui persistent. Toutefois, la tendance à la baisse est évidente, car la faiblesse de l’économie américaine – dont nous parlerons plus loin – vient appuyer l’argument selon lequel de nouveaux progrès sont possibles sur une base tendancielle. La baisse de l’inflation ouvre à son tour la voie à des réductions de taux à court terme.
Après une modeste amélioration de l’indice des prix à la consommation des États-Unis en avril, suivie d’une amélioration marquée en mai, l’indice a de nouveau affiché une nette amélioration selon les données de juin. En fait, le taux global a légèrement baissé, et l’augmentation de l’inflation de base n’a atteint que 0,065 % d’un mois sur l’autre (voir le graphique qui suit). Le taux d’inflation de base annualisé sur trois mois a chuté à seulement 2,1 %, ce qui correspond essentiellement à l’objectif de 2,0 % de la Réserve fédérale (voir le tableau ci-dessous).
La tendance mensuelle de l’indice des prix à la consommation des États-Unis indique une baisse de l’inflation
Juin 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis, Macrobond et RBC GMA.
L’inflation se rapproche de la cible de 2 % de la Réserve fédérale
Nota : En date de juin 2024 pour les mesures de l’IPC et de l’IPP ; de mai 2024 pour les mesures des DPC. Sources : BEA, BLS, Réserve fédérale de Cleveland, Réserve fédérale de Dallas, Macrobond, RBC GMA.
Il est important de noter que le loyer et le loyer équivalent propriétaire ont tous deux diminué pour s’établir à +0,3 % d’un mois sur l’autre pour la première fois depuis août 2021. Les coûts d’habitation ont été de loin le plus important facteur d’inflation, et bien que nous sachions depuis longtemps que les retards pris dans les calculs de l’indice devraient conduire à l’atténuation de la hausse des frais de logement au fil du temps, il est soulageant que cela se produise. Une modeste décélération devrait se faire au cours des prochains trimestres.
Ailleurs dans le panier de prix, le prix des voitures continue de baisser. Du côté des services hors logement, où l’inflation est encore en hausse de 4,8 % par rapport à l’an dernier, la tendance sur trois mois a ralenti pour atteindre un faible niveau annualisé de 1,3 %. L’inflation sur les coûts des vols, des services d’éducation et même des assurances (un facteur d’inflation important jusqu’à il y a deux mois) a été modérée au cours du dernier mois.
Il faut noter cependant que même s’il est possible que le taux d’inflation baisse au cours des prochains trimestres, les données initiales de juillet laissent entrevoir la possibilité d’une légère hausse d’un mois sur l’autre (voir le graphique qui suit).
L’indice quotidien de l’inflation aux États-Unis a connu une légère hausse au mois de juillet
Indice de l’inflation PriceStats au 20 juillet 2024. IPC en date de juin 2024. Sources : State Street Global Markets Research, RBC GMA.
Néanmoins, l’inflation a considérablement diminué et, en réponse, le marché s’attend dans une quasi-certitude à une baisse de taux de la Fed en septembre (97 % d’une baisse est prise en compte). Nous sommes d’accord pour dire que septembre est le point de départ le plus logique, bien que ce ne soit pas une certitude absolue.
Il est intéressant de noter que le marché se demande aujourd’hui s’il pourrait y avoir au total deux baisses de taux par rapport à trois baisses de taux de 25 points de base pour le reste de l’année. Cela implique que la Fed pourrait réduire le nombre de réunions consécutives.
Il y a de quoi s’inquiéter
Les craintes liées à l’inflation se sont apaisées et désormais, c’est la détérioration du contexte de croissance qui inquiète.
Aux États-Unis, les surprises économiques ont été constamment négatives au cours des trois derniers mois.
Les récentes surprises à l’échelle mondiale l’ont été tout autant (voir le graphique qui suit).
L’indice ISM (Institute for Supply Management) de l’industrie manufacturière a de nouveau fléchi en juin, passant de 48,7 à 48,5. Ce fléchissement correspond à une industrie manufacturière qui affiche une légère baisse. Bien que ce ne soit pas nouveau, les fabricants se plaignent de ce volume depuis 2022. Il est très probable que l’indice ISM du secteur des services soit aujourd’hui comparable avec une valeur de moins de 50, à 48,8. Il s’agit du résultat le plus faible depuis le début de la pandémie et une légère tendance à la baisse se maintient (voir le graphique qui suit).
Pire encore, la composante des nouvelles commandes de l’indice ISM du secteur des services est passée d’un indice sain de 54,1 à un indice affaibli de 47,3, et la composante de l’emploi est passée de 47,1 à seulement 46,1.
Les petites entreprises continuent aussi de se plaindre, mais de façon graduellement moins bruyante qu’il y a quelques mois.
Il est raisonnable de s’attendre à un ralentissement économique à partir de maintenant. La question brûlante est de savoir si cela se stabilisera tranquillement dans un scénario d’atterrissage en douceur, ou si la descente se poursuivra jusqu’à un atterrissage brutal tant redouté. Nous continuons à estimer à 65 % les chances d’un atterrissage en douceur et à 35 % le risque d’un atterrissage brutal.
Les surprises économiques deviennent négatives
Au 23 juillet 2024. Sources : Citigroup, Bloomberg, RBC GMA.
L’industrie manufacturière et le secteur des services aux États-Unis sont en contraction
Juin 2024. La zone ombrée représente une récession. Sources : Institute for Supply Management, Macrobond, RBC GMA.
En juin, les données sur l’emploi aux États-Unis ont également été faibles, évaluées au moins une fois sous le nombre respectable de plus de 206 000 employés. La combinaison d’une baisse de 111 000 par rapport aux mois précédents, avec une embauche axée sur les secteurs non sensibles à l’économie comme le gouvernement, les soins de santé et l’aide sociale, et un taux de chômage qui a bondi d’un cran, passant de 4,0 % à 4,1 %, donne une interprétation claire que le marché du travail continue de se refroidir.
Notre indicateur du climat économique selon le Livre beige – essentiellement, notre quantification d’un rapport qualitatif – montre un léger mouvement à la baisse dans la dernière version, changeant partiellement la donne concernant certains gains antérieurs intéressants (voir le graphique qui suit).
L’indicateur du climat économique fondé sur le Livre beige fait état d’une légère baisse
En date de juillet 2024. L’indicateur quantifie les réponses de points de contact locaux en attribuant des pondérations différentes à un éventail de mots positifs et négatifs utilisés dans le livre beige de la Réserve fédérale pour décrire le climat économique global. Sources : Réserve fédérale américaine, RBC GMA.
Compte tenu de tout cela, le PIB des États-Unis au deuxième trimestre suit toujours une croissance annualisée de plus de 2 %, ce qui est bon. Autrement dit, beaucoup d’entreprises se plaignent de l’économie et embauchent moins de travailleurs, mais l’économie elle-même semble tenir bon pour le moment.
Il est raisonnable de s’attendre à un ralentissement économique à partir de maintenant. La question brûlante est de savoir si cela se stabilisera tranquillement dans un scénario d’atterrissage en douceur, ou si la descente se poursuivra jusqu’à un atterrissage brutal tant redouté. Nous continuons à estimer à 65 % les chances d’un atterrissage en douceur et à 35 % le risque d’un atterrissage brutal.
Au début de l’année, lorsque nous avons pris connaissance de ces prévisions, nous espérions être en mesure de réduire progressivement le risque d’un atterrissage brutal au fil du temps. Ce n’est pas ce qui est arrivé. Alors que l’inflation diminue et que des réductions de taux d’intérêt se profilent à l’horizon, la faiblesse visible de certains chiffres économiques fait en sorte que le risque d’un atterrissage brutal est bien réel.
Le prix de consolation est que si une récession devait survenir, l’inflation est maintenant tombée à un niveau suffisamment gérable pour que les banques centrales réduisent fortement les taux, s’assurant ainsi que toute récession éventuelle sera courte et modérée.
Et pendant ce temps au Canada
La Banque du Canada a réduit son taux du financement à un jour de 25 points de base lors d’une deuxième réunion consécutive, ce qui a fait chuter le taux du sommet de 5,00 % à 4,50 % le 24 juillet. Au début de l’été, le débat était de savoir si la banque centrale allait procéder à une seule réduction en juin ou en juillet, mais elle a finalement fait les deux.
En outre, les marchés évaluent maintenant à un peu plus de 50 % la probabilité d’une baisse des taux en septembre et d’une nouvelle réduction plus tard dans l’année. C’est pourquoi le gouverneur Macklem a fait la remarque que « les risques à la baisse deviennent plus importants dans nos délibérations de politique monétaire ».
Les récentes données sur l’inflation au Canada ont remis sur les rails le discours sur l’amélioration de l’inflation, avec une baisse du taux global de 0,1 % en juin, faisant passer le taux de 2,9 % à 2,7 % d’une année sur l’autre (voir le graphique suivant).
Au Canada, l’inflation globale selon l’IPC et l’IPC de base ont baissé
Juin 2024. Sources : Statistique Canada, Macrobond, RBC GMA.
Les coûts d’habitation ont été le principal facteur restant d’inflation au Canada. Mais, parmi ceux-ci, les prix de l’immobilier se sont déjà stabilisés et les versements d’intérêts hypothécaires s’amélioreront à mesure que la Banque du Canada réduira les taux, laissant l’IPC des loyers la principale préoccupation qui subsiste. Fait encourageant, Urbanation a récemment déclaré que les loyers de juin ont diminué de 0,8 %, soit la baisse mensuelle la plus importante depuis le début de 2021.
L’Enquête sur les perspectives des entreprises confirme un nouveau léger ralentissement de l’économie canadienne (voir le graphique suivant).
L’indicateur de l’Enquête sur les perspectives des entreprises continue reste bas.
Au T2 2024. Sources : Enquête sur les perspectives des entreprises de la Banque du Canada, Macrobond, RBC GMA.
Du côté de l’emploi, le Canada a perdu 1 400 emplois en juin, ce qui est peu, mais pas tout à fait remarquable, compte tenu de la volatilité des données sur l’emploi au pays. Mais deux choses étaient préoccupantes.
Tout d’abord, en raison de l’énorme accroissement de la population du pays, le taux de chômage continue de grimper, passant de 6,2 % en mai à 6,4 % en juin contre un creux de 4,8 % en juillet 2022. Nous sommes enclins à croire que le taux de chômage naturel du Canada se situe dans une fourchette de 6,0 % à 6,5 %, ce qui signifie que le pays est peut-être à un mois ou deux d’une certaine capacité excédentaire au sein de l’économie.
Curieusement, malgré cela, la croissance des salaires des travailleurs permanents est non seulement restée rapide, en hausse de 5,6 % par rapport à l’année précédente, mais elle s’est aussi accélérée par rapport à une baisse de 5,2 % d’une année sur l’autre le mois précédent. Dans le contexte d’un taux d’inflation inférieur à 3 % et d’une croissance de la productivité qui a été négative de façon chronique, cela représente une menace pour la stabilité des prix (voir le graphique suivant). Mais la croissance des salaires devrait ralentir, compte tenu du ralentissement du marché du travail (voir le graphique suivant) et de la diminution des intentions de hausse des salaires (voir le graphique suivant).
Le marché canadien du travail s’est considérablement refroidi
Au T2 2024. Sources : Enquête sur les perspectives des entreprises de la Banque du Canada, Macrobond, RBC GMA.
Les pressions salariales se sont apaisées au Canada
Au T2 2024. Sources : Enquête sur les perspectives des entreprises de la Banque du Canada, Macrobond, RBC GMA.
Tout cela revient à dire que l’économie canadienne ralentit, que le chômage augmente et que l’inflation diminue. Cela valide les décisions de la Banque du Canada en matière de réduction de taux et fait valoir qu’il est possible de procéder à d’autres assouplissements dans les mois à venir, d’autant plus que le Canada est une économie très sensible aux taux et qu’il pourrait y avoir des renouvellements hypothécaires potentiellement douloureux au cours des deux prochaines années.
– Avec la contribution de Vivien Lee, de Vanita Maharaj et d’Aaron Ma
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